Les Séparents

Les Séparents, c'est l'histoire de parents séparés mais ensemble. Les Séparents, c'est une nouvelle histoire des relations homme-femme.

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Par Renaud Charles
22 juin · 4 mn à lire
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Comment nous sommes devenus des "séparents"

Continuer à être des parents unis tout en étant séparés, des parents qui ne s'aiment plus du même amour qui les a fait se mettre ensemble, mais qui souhaitent continuer à former une famille en partageant le même toit avec leurs enfants, voilà ce que moi, Renaud, et mon ancienne amoureuse, Nathalie avons choisi d'être : des séparents.

© Illustration par Renaud Scapin pour Les Séparents© Illustration par Renaud Scapin pour Les Séparents

Il y a un peu plus d'un an, Nathalie et moi - Renaud - sommes devenus des « séparents », c’est-à-dire des parents qui ne s’aiment plus suffisamment pour continuer à faire semblant, sans se détester au point de tout envoyer valser. D’un commun accord, nous avons mis un point final à notre histoire d’amour née en 2005 mais sans pour autant renoncer à notre vie de famille. Si nous continuons d’habiter ensemble avec nos deux enfants, nous ne sommes pas ce qu’il est courant d’appeler un couple libre. Nous sommes libres mais ne sommes plus un couple. Ce que nous sommes ? Des parents, des confidents, des soutiens, des équipiers, des « compagnons de vie » comme nous appelle Nathalie.

Nous ne voulions plus - ne pouvions plus - entretenir la fable du « ils se marièrent (ce que nous n’avons jamais fait d’ailleurs), eurent beaucoup d’enfants (pas tant que ça en fait même si pour moi deux enfants c’est à la fois le minimum et le maximum) et vécurent ensemble jusqu’à ce que la mort les séparent ». Cette mythologie du couple exige qu'en plus de tout ce qui leur incombe, les « bons parents » soient des amoureux tout au long de leur vie. Au final, les contrevenants n’auraient le choix qu’entre brûler dans les flammes de la frustration pour maintenir l’illusion aux yeux du monde, ou bien affronter le casse-tête de la garde alternée.

Cesser de s’aimer doit-il être vécu forcément comme un échec et mener inévitablement à l'éclatement de la famille ?

Sans remettre en cause la nécessaire porte de secours que représente le divorce, est-ce l’unique voie lorsqu’on ne s’aime plus ? Est-il impur d’avouer qu’on n’est plus des amants ? Est-ce aux enfants d’être tributaires de la versatilité des sentiments de leurs parents ? Cesser de s’aimer doit-il être vécu forcément comme un échec et mener inévitablement à l'éclatement de la famille ?

Malgré les tabous et les injonctions, Nathalie et moi avons choisi une autre voie, conserver le même toit tout en reprenant notre liberté. De cette façon, ce ne sont plus aux enfants de s’adapter à la nouvelle donne amoureuse de leurs parents mais aux parents de vivre leur nouvel amour en alternance (avec l’avantage d’éviter que la routine s’installe dans cette nouvelle relation amoureuse). Evidemment, ce n’est ni une décision simple à prendre (nous avons beaucoup tâtonné avant d’en arriver là), ni une situation qui coule de source.

Loin des dogmes, nous construisons notre propre histoire de la vie de famille.

Encore aujourd'hui, nous sommes toujours en train d’inventer cette nouvelle vie. Mais cela a déjà permis d’atténuer l’effet cocotte-minute qui, à force de maintenir les frustrations sous pression, alimente les prises de bec pour des raisons souvent bien futiles. Alors certes les engueulades n’ont pas entièrement disparu mais elles ressemblent plus aux disputes entre frère et soeur pour savoir qui aura le dernier mot. Il n’y a plus d’attentes insatisfaites, en particulier pour moi qui restait le plus amoureux des deux et qui attendait de l’amour en retour, chose impossible à exiger. En y renonçant, je suis parvenu à m’extraire de l’état de dépendance dans lequel je me consumais pour enfin aller de l’avant. Aujourd’hui, nos rapports sont clairs, autant pour nous que pour nos enfants à qui nous avions marre de mentir et d’offrir une piètre vision de l’amour.

Loin des dogmes, nous construisons notre propre histoire de la vie de famille. Une histoire pas banale (bancale penserons certains) qui me fait beaucoup cogiter sur les relations homme-femme. Ces réflexions, ainsi que la manière dont nous vivons notre tandem Nathalie et moi, je souhaite le partager pour ouvrir le dialogue, sortir des carcans. D’autant que la parole des hommes reste encore assez timide sur ces sujets. Voilà pourquoi je me lance dans la création de cette newsletter, « Les Séparents », où je vous partagerai une à deux fois par mois un peu de notre quotidien tout en allant à la rencontre de ceux qui ont appris à tisser des relations pacifiées. Les Séparents, c’est parti !

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